Auteur : Chakè Matossian
Bibliothèque des Lumières, Ed. Droz
Rousseau décida un jour de s’habiller en Arménien. Il déclara : « Et je ne portai plus d’autre habit ». Il était nécessaire d’examiner ce choix vestimentaire décisif à la lumière de l’œuvre, incluant l’expérience vécue et les lectures du philosophe, pour montrer que loin de ressortir au caprice ou à l’utilitaire, loin d’être anecdotique, l’habit arménien s’accorde avec l’univers de pensée de Rousseau. C’est l’habit qu’il habite.
Les différentes dimensions symboliques de l’habit arménien examinées ici confèrent à ce choix vestimentaire une valeur de signe, éclairant les questions philosophiques et politiques cruciales aux yeux de Rousseau : l’immortalité de l’âme, le commerce entre les hommes. L’habit arménien recouvre le moi physique, imaginaire, musical et spirituel du citoyen de Genève, il lui procure l’aura du mage, l’animalise et le divinise tout à la fois. Seul l’habit arménien aura montré Rousseau dans toute la vérité de sa nature et l’aura désigné comme ce qu’il est : « autre ».